mardi 27 décembre 2016

Berezina - Sylvain Tesson


Sylvain Tesson nous fait part dans ce livre de son périple de Moscou à Paris en side-car. Ce fut une lecture enrichissante. 

Titre du livre :
Berezina
Auteur :
Sylvain Tesson
Editions :
Folio
Genre :
Récit de voyage
Date de sortie :
Février 2016
Pages :
205
Thèmes :
Voyage en side-car, Russie, Napoléon, Grande Armée

Résumé éditeur :

« Il y a deux siècles, des mecs rêvaient d’autre chose que du haut-débit. Ils étaient prêts à mourir pour voir scintiller les bulbes de Moscou. »

Tout commence en 2012 : Sylvain Tesson décide de commémorer à sa façon le bicentenaire de la retraite de Russie. Refaire avec ses amis le périple de la Grande Armée, en side-car ! De Moscou aux Invalides, plus de quatre mille kilomètres d'aventures attendent ces grognards contemporains.

Mon avis :

Sylvain Tesson réussit à mêler récit de voyage et récit historique avec brio. C’est un bel hommage qu’il a voulu rendre, accompagné de sa bande de potes, aux soldats de la Grande Armée de Napoléon lors de la Retraite de Russie en 1812.

Le contexte est bien expliqué et que l’on connaisse ou non cet épisode de l’Histoire, le lecteur n’est pas perdu. Au contraire, j’ai trouvé ma lecture enrichissante, j’ai appris des choses sur Napoléon et sur cette folie guerrière.
Je suis agréablement étonnée de cette superposition constante entre voyage et Histoire, je trouve cela très réussi, instructif tout en étant plaisant à lire.

Dans ces récits de voyage, Sylvain Tesson nous offre la possibilité de découvrir des endroits hors des sentiers battus, on le sent également proches des gens qu’il rencontre, et intéressé par ce qu’ils ont à dire.
J’aime ses livres et j’aime sa plume très littéraire et travaillée. Il a le sens de la formule et que l’on soit d’accord ou pas avec ses idées, je trouve sa plume terriblement efficace.

De nombreuses références littéraires à Dostoïevski et Tolstoï parsèment son récit, de même on trouve des références philosophiques, notamment sur le penseur irlandais George Berkeley. Grace à cela, Tesson nous propose des pistes de réflexion.

Son invitation à réfléchir est un des points qui me plait le plus dans ses écrits car parfois certaines piqures de rappel sont nécessaires.
Autant, parfois dans certains livres, l’étalage de connaissances peut m’agacer, autant j’ai trouvé ici toutes ses références utiles et intéressantes.

Grace à Tesson, on a eu une petite pensée pour tous ces morts pendant la Retraite de Russie. L’auteur a tenu également à rendre hommage l’espace de deux pages aux chevaux morts pendant cette épopée. Effectivement cette guerre a été un vrai massacre pour nos amis chevaux, j’ai apprécié ce petit hommage au martyr équin auquel on ne pense pas forcément.

Lors de son voyage, Sylvain Tesson a pu croiser les soldats de Napoléon qui ont pris la forme de spectres, de zombies, avec un champ lexical de la mort et de l’horreur assez percutant. Il leur a rendu hommage à sa façon, juste en pensant à eux, en se demandant quel pouvait être leur état d’esprit à ce moment-là. Et forcément cela amène à faire des parallèles avec nos mentalités à l’heure actuelle. Ces soldats qui se battaient pour l’honneur et la gloire de leur patrie, qu’auraient-ils pensé de nous ?

Personnellement je n’ai pas besoin (ni envie) d’aller me geler le cul par des -20 °C pour me rendre compte que la seule chose pour laquelle l’homme moderne se bat est son propre confort. Mais l’idée et le geste méritaient bien un livre. Le devoir de mémoire est important. Ce sont d’ailleurs toutes les horreurs du passé et la peur de les revivre qui font que l’on tient tant à notre confort, comme le souligne justement l’auteur.

Par contre, le récit de son petit détour à Berlin pour aller « rendre visite » à sa copine n’étais pas nécessaire selon moi et n’apporte rien de plus, on aurait pu s’en passer. C’est le seul point négatif que je peux souligner pour cette lecture.

En bref si vous lisez ce livre, vous rencontrerez Tesson et ses potes baroudeurs, vous croiserez des fantômes du passé morts sur la route pour rentrer chez eux, vous suivrez Napoléon dans sa folie, tout cela bien arrosé de vodka et dans le froid glacial de l’hiver russe.


Citations :

« La France, petit paradis peuplé de gens qui se croient en enfer. » p.28
« Par le hublot, il avait découvert le vrai visage de l’hiver russe : un paysage dépressif. » p.30
« La vodka est autrement plus efficace que l’espérance. Et tellement moins vulgaire. […] En Russie, l’art du toast a permis de s’épargner la psychanalyse. Quand on veut vider son sac en public, on a pas besoin de consulter un freudien mutique, allongé sur un divan. » p.30

« J’avais 40 ans et j’étais nostalgique d’un monde que je n’avais pas connu. Je préférais ces ambiances à celles des hôtels standardisés dont le capitalisme à visage inhumain avait couvert nos centres-villes : ces établissements conçus par des commerciaux qui jugeaient qu’une connexion wi-fi et un climatiseur fixé au-dessus d’une fenêtre verrouillée valaient mieux que la conversation d’une babouchka et qu’une fenêtre ouverte sur un fleuve gelé. » p.93-94
En quelques mots :

Le récit d’une aventure en side-car sur 15 jours, sous fond de commémoration historique. Un texte efficace et glaçant qui nous transporte sur la route de Moscou à Paris. Un hommage fort à tous ces morts qui ont suivi Napoléon dans sa folie, qui sont morts de faim, de froid, de désespoir sur la route qui les ramenaient chez eux.
Une lecture enrichissante.


Ma note pour ce livre :
4/5





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